Où j'en suis avec mon norvégien ? Car c'était là ma principale interrogation en revenant, plus de trente ans après, en Norvège : allais-je comprendre les gens et me faire comprendre sans trop de difficulté ? parce que, si je parviens assez aisément à lire n'importe quel texte, même littéraire et les grands classiques, je n'ai jamais réussi encore à saisir le norvégien parlé. Bon, j'avoue que cela n'a pas été sans difficultés, je ne suis toujours pas capable de suivre parfaitement une conversation entre deux natifs. Par exemple, au début de mon séjour, lorsque je parlais d'animaux domestiques, on me répondait invariablement «oui, la vie est très chère en Norvège !» Mais cela n'a pas été finalement si catastrophique, j'ai toujours réussi à me faire comprendre, et cela ira de mieux en mieux au fil de mes prochains voyages. Je redoutais surtout le dialecte du Valdres, mais curieusement le norvégien parlé en province, mis à part quelques petites variantes, jeg kjem pour jeg kommer, m'a semblé plus facile à comprendre que celui parlé à Oslo. Plusieurs fois, je me suis arrêté au bord des routes du Valdres, dans la campagne, pour discuter avec de vieux paysans norvégiens, de la pluie et du beau temps, ou même se raconter des histoires drôles. Je pense qu'ils avaient un autre rythme qu'à Oslo, qu'ils avaient donc le temps, le temps pour l'autre, pour l'écouter, échanger, parler. J'ai compris que ma capacité de compréhension était moins liée au dialecte de mon interlocuteur qu'à son état d'esprit, qu'à son attitude plus ou moins bienveillante et sa volonté sincère de communiquer... Les gens rencontrés se sont presque toujours accommodés de mon accent "exotique" ("vous êtes Allemand ?"), sauf une fois dans un supermarché, une vendeuse qui était tellement stressée de ne pas arriver à me comprendre qu'elle ne m'écoutait plus. J'avais toujours en ce cas mon petit carnet sur lequel j'écrivais ce que je voulais dire... Le jour de mon départ d'Oslo, alors que je me dirigeais vers le centre ville, vers Oslo-S, une jeune femme m'a abordé pour me demander si je savais où se trouvait la clinique vétérinaire de Sinsen. Non seulement j'ai compris tout de suite qu'elle ne me parlait pas de la cherté de la vie en Norvège, mais en plus je savais où se trouvait cette clinique, et je pus lui répondre.
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